Les Critiques sont-ils ceux que vous croyez ?
Réponses de Renaud Baronian
1. De quel milieu social êtes-vous issu(e) ? Venez-vous de Paris ou de province ?
Milieu social CSP-Originaire de province, résidant à Paris depuis 1987.
2. Quelle est votre expérience des rapports entre hommes et femmes au sein du milieu de la critique ?
Mon expérience avec mes consœurs est du genre détendue, confraternelle, voire amicale.
3. Quelle est votre manière de pratiquer (ou pas) la politique des auteurs ?
Je ne pratique pas forcément, à titre personnel comme professionnel - je travaille pour un quotidien dit “populaire” et grand public - une politique des auteurs. Ma cinéphilie n’a qu’un maître : le film lui-même. Je ne serai pas indulgent avec un film que j’estime raté parce qu’il est signé d’un cinéaste que j’apprécie, le contraire est vrai aussi : je peux adorer un film d’un cinéaste qui me rebute, c’est arrivé. Mais j’essaierai toujours de défendre le cinéma d’auteur, même si certains de mes lecteurs ne sont pas forcément sensibles ou concernés par cette démarche. L’inverse est vrai : quand j’aime un film, peu m’importe qu’il ait été réalisé par un cinéaste qui n’a pas “la carte”, ou qui est détesté ou méprisé de certains cinéphiles/auteurs - encore une fois, pour moi c’est le film qui compte avant tout, bien plus que les considérations qui peuvent l’entourer.
4. Dans quelle mesure vos relations – amicales, professionnelles ou mondaines – avec les cinéastes et les autres critiques peuvent-elles parfois avoir une influence sur votre manière de parler des films ?
J’essaye de ne pas avoir de conversations et le moins possible de relations avec des cinéastes lorsqu’ils signent un film, pour éviter toute influence avant d’écrire mes critiques. Avec mes confrères, c’est différent, les débats sont souvent bénéfiques et parfois éclairants, il se peut que je change d’avis si un confrère m’alerte ou m’éclaire sur un point qui m’avait échappé.
5. Comment votre activité critique cohabite-t-elle avec le fait de faire des films ou le choix de ne pas en faire ?
Dans mon cas le choix est de ne pas en faire, je n’ai pas cette ambition et je reste spectateur, guide, critique.
6. Existe-t-il un principe moral que vous vous interdisez de transgresser dans le cadre d’une critique ?
Oui, beaucoup, les mêmes qu’au quotidien : pas de sexisme, de racisme, d’exclusion d’aucune sorte dans mes critiques, et ce ne sont que quelques exemples. Je reste concentré sur les qualités - ou les défauts - cinématographiques des œuvres, leurs messages, leurs aspirations.
7. Identifiez-vous une spécificité de la génération de critiques à laquelle vous appartenez ?
Ma génération de critiques a, pour une part, eu tendance à une subjectivité non argumentée, et, pour une autre, à tout intellectualiser et à analyser les films de façon trop pointue, à destination unique de lecteurs très avertis ou du milieu. J’ai toujours essayé d’éviter l’une et l’autre de ces démarches, en regardant les films et en rendant compte comme un spectateur certes averti, mais en tenant davantage compte de mon ressenti que de ma culture cinéphile. De la même manière, j’essaye d’éviter certains tics de la jeune génération de critiques qui regardent les films avec des grilles préétablies, en comptant par exemple le temps d’écran des hommes et des femmes dans chaque film. Je préfère regarder un film en en profitant pleinement, qu’il me fasse de l’effet ou pas… Le temps de l’analyse vient ensuite, ma mémoire fait de le reste ou, à défaut, je revois les films avec un regard plus “critique” avant d’écrire.