Lettre ouverte à Judith Godrèche



Chère Judith,

Votre courage et vos mots, à la cérémonie des César du cinéma français, nous ont profondément émus et interpellés.

Vous évoquez notre communauté, chère Judith, cette famille aux secrets et aux tourments enfouis que vous éclairez d’un faisceau cru de vérité. 

Nous, membres de la critique cinématographique, sommes également issus de cette famille que vos mots percutent. 

Vos coups contre la porte blindée de l’indifférence cognent fort. 
Vous avez raison : les films nous regardent autant que nous les regardons. 

Comme vous, nous aspirons à un jour nouveau, où aucun enfant, aucune jeune fille, aucun jeune homme ne sera contraint de vivre ses rêves de cinéma comme des cauchemars. 
Comme vous, nous rejetons l’idée que cet art que nous élevons si haut serve si bas de « couverture pour un trafic illicite de jeunes filles ». Cette expression nous glace : elle ne reflète ni notre conception du cinéma, ni nos principes, ni nos valeurs. Nous rejetons toute forme de cinéma instrumentalisé à des fins de violence, d’abus, de domination, d’emprise et d’humiliation.

« Depuis quelque temps », dites-vous, « je parle, je parle, mais je ne vous entends pas, ou à peine. Où êtes-vous ? Que dites-vous ? » 
Nous sommes là.
Nous ne vous tournons pas le dos.
Nous ne nous dérobons pas.
Nous écoutons et nous entendons. 
Soyez assurée que vos paroles étouffées depuis tant d’années nous parviennent.
Soyez certaine de la résonance soudaine qu’elles trouvent en nous, critiques de cinéma.

Nous, critiques, affirmons notre rejet absolu de toute forme de violence dans le cinéma, que nous aspirons à voir intègre et respectueux envers toutes celles et tous ceux qui le façonnent.


Le Syndicat Français de la Critique de Cinéma